Le vécu psychologique des hommes dans un parcours de PMA : lorsque le bilan masculin est normal.
- Déborah Schouhmann-Antonio

- 20 sept.
- 2 min de lecture

Accompagner sa partenaire dans un parcours de Procréation Médicale Assistée (PMA), même sans infertilité masculine,
déclenche un ensemble complexe de ressentis et de mécanismes psychiques. Les
hommes se trouvent dans une position ambivalente : ils souhaitent être présents et
protecteurs, mais se confrontent à leurs propres limites émotionnelles.
1. Sentiment d’impuissance et anxiété anticipatoire
Ne pas subir soi-même les traitements ne protège pas de la souffrance psychologique.
Les hommes ressentent souvent un sentiment d’impuissance, face aux douleurs, aux
échecs ou aux traitements invasifs de leur partenaire. Cette incapacité à agir directement
génère de l’anxiété anticipatoire : chaque rendez-vous médical, chaque injection ou
examen devient un objet de tension. Psychologiquement, ce stress anticipatif peut
entraîner vigilance accrue, rumination et hypercontrôle émotionnel, comme pour
compenser l’absence de maîtrise sur la situation.
2. Culpabilité et responsabilité
Même sans infertilité, les hommes peuvent intérioriser un sentiment de responsabilité
excessive. Si un cycle échoue, ils peuvent se sentir coupables de ne pas avoir su
protéger la partenaire de la déception ou de ne pas avoir « assez » soutenu
émotionnellement. Cette culpabilité est souvent exacerbée par le besoin de rester fort et
rassurant, et elle peut masquer des émotions profondes de peur et de tristesse.
3. Répression émotionnelle et isolement
Pour rester en accord avec l’image sociale de la virilité, de nombreux hommes répriment
leurs émotions. La tristesse, la peur ou la frustration sont intériorisées pour ne pas «
alourdir » le couple. Cette répression émotionnelle peut créer un conflit intrapsychique
: le désir de partager leurs ressentis se heurte à la peur d’être jugé faible ou inutile.
L’isolement psychique qui en résulte peut intensifier l’angoisse et générer des tensions
dans le couple.
4. Empathie et hyper-vigilance
Psychologiquement, accompagner un parcours de PMA développe une hyper-vigilance
émotionnelle. L’homme doit lire, anticiper et répondre aux besoins de sa partenaire tout
en régulant ses propres émotions. Cette empathie intense est une force, mais elle peut
devenir un fardeau lorsqu’elle se conjugue avec l’incapacité de contrôler le processus
médical. Il se peut qu’il intériorise la détresse de la partenaire, amplifiant ainsi son propre
stress et sa fatigue psychique.
5. Gestion de la temporalité et de l’attente
La PMA impose un rythme médical strict, ponctué d’attentes et d’incertitudes. Les
hommes doivent naviguer dans une temporalité suspendue, où chaque décision,
chaque résultat ou chaque retard peut déclencher de l’anxiété. Psychologiquement, cette
attente prolongée peut réveiller des mécanismes de contrôle ou de perfectionnisme,
ainsi qu’un sentiment latent d’aliénation face à l’inéluctable.
6. Résilience et maturation émotionnelle
Malgré la tension et le stress, ce parcours favorise souvent une réorganisation
psychique constructive. Les hommes développent une capacité accrue à gérer les
émotions, à comprendre celles de leur partenaire et à réguler la dynamique du couple.
Psychologiquement, la PMA peut stimuler l’introspection, la résilience, et l’acquisition
d’une intelligence émotionnelle plus fine, transformant le vécu d’accompagnement en
apprentissage profond de soi et de la relation.
7. Légitimité et reconnaissance
Reconnaître la souffrance psychique des hommes dans ces parcours est crucial. Le rôle
d’accompagnant n’est pas passif : il implique une vigilance constante, une charge
émotionnelle invisible et des ajustements permanents. La validation de ces expériences
permet de réduire l’isolement, d’ouvrir un espace de communication authentique et de
maintenir l’équilibre psychologique du couple.

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